Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 6 octobre 2016
Sécurité

Troubles à l'ordre public dans les manifestations : l'État durcit le ton

Le ministère de la Justice vient de publier une circulaire du 20 septembre, signée du directeur des affaires criminelles et des grâces, Robert Gelli, et consacrée à « la lutte contre les infractions commises à l’occasion des manifestations et autres mouvements collectifs ». Il s’agit clairement, après les incidents qui se sont déroulés lors des manifestations contre la loi Travail, et, peut-être, en prévision de l’évacuation de la « ZAD »  de Notre-Dame-des-Landes, de faire le point sur l’arsenal juridique existant en la matière. Avec à la clé une évidente volonté de durcissement.
La circulaire détaille les différents « mouvements collectifs »  qui peuvent donner lieu à des incidents et à une action des forces de l’ordre : « manifestations, violences urbaines, mouvements dits zadistes ». Elle rappelle que toute manifestation sur la voie publique « doit faire l’objet d’une déclaration préalable »  (en mairie ou en préfecture), et que si cela n’a pas été le cas, seuls les organisateurs peuvent être interpellés, et non les « simples participants ». Sauf dans le cas précis d’une manifestation interdite dans le cadre de l’état d’urgence, où organisateurs et participants qui défient l’interdiction peuvent être arrêtés et condamnés.
L’auteur de la circulaire constate qu’en cas de troubles, des procédures « de mauvaise qualité »  conduisent les parquets à prononcer souvent des relaxes ou à classer sans suite. Il invite donc les forces de l’ordre et plus généralement les pouvoirs publics à mettre en œuvre des « dispositifs »  plus efficaces, en amont et en aval des manifestations. En amont, il invite notamment les procureurs à se saisir, de concert avec les préfets, des nouvelles dispositions issues de la loi du 3 juin 2016, renforçant la possibilité de demander la fouille des véhicules et des bagages à proximité des manifestations ou « sur les axes de circulation permettant de s’y rendre ».
En aval, il est conseillé d’utiliser au maximum les éléments de preuve dont peuvent disposer les forces de l’ordre, comme les images vidéo tournées par les unités de maintien de l’ordre mais aussi « la saisie des images de vidéoprotection ».
Robert Gelli invite également les juridictions à mettre en place, par avance, des moyens ponctuellement renforcés en cas de manifestation pouvant conduire à un grand nombre d’interpellations : création « d’audiences correctionnelles dédiées »  pour les comparutions immédiates, avec des moyens permettant de diffuser à l’audience les images vidéos des faits, « y compris les enregistrements de vidéoprotection ».
En annexe, la circulaire rappelle les qualifications pénales qui peuvent être retenues à l’égard de personnes ayant commis des délits dans le cadre de manifestations. Il est notamment relevé que si la manifestation est une liberté fondamentale « protégée par la loi », l’attroupement ne l’est pas, et que le fait de continuer à participer à un attroupement après deux sommations des forces de l’ordre est puni d’un an de prison et 15 000 euros d’amende. Et davantage encore en cas de circonstance aggravante, comme « le fait de dissimuler volontairement tout ou partie de son visage ».
Autre cas évoqué, et auquel peuvent parfaitement être confrontés certains élus : « le délit d’opposition à l’exécution de travaux publics »  (art. 433-11 du Code pénal). « Cet article, qui peut être retenu dans le cas des ZAD, tend à protéger l’exécution de travaux (réalisés) pour le compte de l’État ou des collectivités locales ». Ce délit est puni d’un an de prison et 15 000 euros d’amende, assortis éventuellement de privation de droits civiques et d’interdiction d’exercer une profession dans la fonction publique. Ces peines sont lourdement aggravées en cas de dissimulation de visage, usage d’une arme, voie de fait contre un agent de la force publique, etc.
F.L.
Télécharger la circulaire.

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